5 Avril 2024

Exposition 2024 : le Terra Sancta Museum réunit Compostelle et Jérusalem

de EMILIE REY

C’est à la Cidade da Cultura, haut-lieu de la culture galicienne, qu’a été inaugurée « Tesouros reais. Obras mestras do Terra Sancta Museum » le 21 mars dernier. L’exposition, dont l’entrée est gratuite, présente 108 pièces provenant de Jérusalem, de Lisbonne et de divers musées de la Galice. Toutes les visites guidées proposées sont d’ores et déjà réservées ! Retour sur cette première espagnole, les perspectives qu’elle ouvre et les liens qu’elle resserre.

Le Terra Sancta Museum a humblement mis ses pas dans ceux de générations de frères missionnaires galiciens, « plus de 300 depuis 1862 dont le bienheureux Fr. Juan Jacobo Fernández, martyrisé à Damas » tient à souligner Fr. Juan Manuel Buján, actuel Provincial de Saint-Jacques-de-Compostelle et commissaire local de l’exposition qui vient de s’ouvrir.

ART MISSIONNAIRE

C’est en 1835 que les frères espagnols trouvèrent refuge en Terre Sainte après la suppression des ordres religieux masculins et leur expropriation. L’espoir revient en novembre 1852 sous la pression d’Isabelle II d’Espagne exprimant, par décret royal, son désir d’ouvrir une maison de formation pour les missionnaires destinés à la Terre Sainte. « Le gouvernement adopta des dispositions pour la conservation des couvents et des collèges des Lieux Saints de Jérusalem et de leurs dépendances. L’Obra Pía prit ainsi possession du couvent de Priego (Cuenca), et il devint un Collège des Missions pour la Terre Sainte avec l’obligation pour les frères qui s’y trouvaient de “se tenir prêts à se rendre à Tanger ou en Palestine”. Le Collège de Priego fut suivi par ceux de Saint-Jacques-de-Compostelle et de Chipiona.

Traits-d’union entre deux mondes, ces frères espagnols furent de vrais promoteurs de la Terre Sainte. « Fr. Juan Rodríguez de Legísima fonda la Société Espagnole des Amis de la Terre Sainte et organisa une grande exposition, en 1954, à Madrid. Durant trente-neuf ans, il a collectionné et soigneusement entretenu des œuvres qui ont permis la création, en 1993, du Museo de Terra Santa qui se trouve dans notre couvent franciscain » poursuit Fr. Juan Manuel Buján.

ENRICHIR L’ÉTAT DE LA CONNAISSANCE

Compostelle-Jérusalem. C’est aussi une destinée commune de villes pèlerines que cette exposition présente. Après le succès de celle de Lisbonne, admirée par plus de 50 000 visiteurs, Frère Stéphane Milovitch, Directeur des Biens culturels de la Custodie de Terre Sainte, explique : « chaque exposition est différente, le discours change et s’enrichit en fonction du lieu, des publics, des commissaires locaux qui sont associés et des collections présentes sur place. Dans notre futur musée nous aurons toute une section consacrée aux missions des franciscains en Terre Sainte et notamment l’accueil des pèlerins de l’Église universelle. Il y a des parallèles intéressants ».

© Cidade da Cultura de Galicia

Frère Stéphane est venu avec une partie de l’équipe du projet et des membres du Comité scientifique. À l’exemple de Raphaëlle Ziadé, Responsable du Département byzantin du Petit Palais (Paris) et spécialiste du patrimoine artistique des communautés chrétiennes d’Orient, qui s’est vu confier la réalisation de la section de l’Art chrétien oriental. « Cette exposition est l’occasion d’enrichir nos connaissances. Les œuvres en nacre qui y sont exposées – en provenance du Museo de Terra Santa – représentent une partie des collections liées à la Custodie que nous ne connaissions pas. On va maintenant pouvoir comparer les œuvres, trouver des ressemblances et comprendre comment elles sont arrivées dans la péninsule ibérique » détaille l’experte qui a déjà commencé à mener son enquête.

APPRENDRE AUX COTÉS D’EXPERTS MUSÉAUX

À la Cidade da Cultura de Galicia, le « grand Jour » est arrivé. Toutes les énergies sont mobilisées et ce depuis trois mois, sans répit. « Bâtir une exposition en si peu de temps est un tour de force. Je suis impressionnée par le professionnalisme et le dynamisme des équipes que j’ai rencontrées » glisse admirative Béatrix Saule, Présidente du Comité scientifique. Fr. Stéphane est quant à lui plein de gratitude pour les architectes et les ingénieurs sécurité du lieu qui ont pris le temps d’échanger autour d’enjeux cruciaux.

« Ces contacts sont précieux surtout pour un musée comme le nôtre encore en construction. Nous prenons note de tout conseil et retour d’expérience. Je salue aussi à l’occasion le soutien du Prof. António Filipe Pimentel, Directeur du Musée Calouste Gulbenkian, qui a permis à Rui Xavier et André Afonso d’assurer le convoiement, les constats d’état et l’installation de nos œuvres qu’ils connaissent bien pour les avoir restaurées et manipulées à Lisbonne. Ce musée est une histoire d’hommes et de femmes passionnés ; nous, franciscains, sommes tellement reconnaissants pour toute leur disponibilité et ce partage de savoirs. »

COMME UN PARFUM DE JÉRUSALEM

Il est maintenant 18h, Alfonso Rueda Valenzuela, Président de la Xunta de Galicia – le gouvernement autonome de Galice – fait son arrivée. Il salue tour à tour Fr. Francesco Patton, Custode de Terre Sainte, qui a fait le déplacement pour soutenir le projet du Terra Sancta Museum « mais aussi en l’honneur de ce lien fort entre la Galice et la Terre Sainte », puis Mgr Bernardito Cleopas, Nonce apostolique pour l’Espagne, Mgr Francisco José Prieto Fernández, Archêvêque de Compostelle et Mgr Alfonso Carrasco Rouco, évêque de Lugo ainsi que les nombreux franciscains venus pour l’évènement.

© Cidade da Cultura de Galicia

Après une visite de l’exposition en présence des commissaires – Jacques Charles-Gaffiot, membre du comité scientifique du Terra Sancta Museum, Esperanza Gigirey Liste, directrice du Musée des pèlerinages et de Santiago et enfin Fr. Juan Manuel Buján, Ministre provincial – tous les invités sont rassemblés pour un temps de discours. Le Custode prend la parole et, après avoir félicité tous les acteurs du projet, il exprime sa joie de voir ravivée cette « relation historique entre nos deux provinces ». Il poursuit : « ces expositions de par le monde sont essentielles, elles permettent de faire connaître la Terre Sainte, son histoire et sa valeur culturelle, en plus du religieux et du spirituel ».

© Cidade da Cultura de Galicia

Alors que l’Eglise vient de célébrer Pâques, Compostelle prend des airs de Jérusalem et on a presque envie de dire aux nombreux pèlerins espagnols qui ne pourraient se rendre en Terre Sainte que Jérusalem est venue jusqu’à eux.

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