« Ces collections de céramiques sont un trésor de données historiques. »

TERRA SANCTA MUSEUM/ENTRETIEN : Rencontre avec Stefania Peluso, archéologue à la Custodie de Terre Sainte (Jérusalem), chargée d’étudier la collection de céramiques datant du 15ème et 16ème siècle, retrouvée sous la future section historique du Terra Sancta Museum.

En quoi les collections de céramiques trouvées sous la sacristie de Saint Sauveur sont-elles remarquables ?

Le matériel retrouvé sous le futur emplacement du musée est un véritable trésor de données historiques. Elles nous permettent de reconstituer la présence de l’ordre franciscain en Terre Sainte et l’histoire du couvent de Saint Sauveur (Jérusalem ). La partie la plus importante de la collection, datant du quinzième et du seizième siècle, concerne la vie quotidienne des frères dans le cénacle franciscain.

A quoi correspond cette période ?

C’est une époque assez méconnue, au cours de laquelle les franciscains ont été chassés du Cénacle et ont dû être transférés au couvent Saint-Sauveur. La vie des frères à Jérusalem n’était pas bien comprise. Les matériaux trouvés montrent que les frères exerçaient déjà une activité d’apothicaire lorsqu’ils étaient au Cénacle. Ils ont acquis une précieuse collection de poteries pharmaceutiques de différentes formes et origines. On a également trouvé de nombreux verres et de nombreux vaisseaux utilisés pour la préparation des sirops et des pommades. Grâce à cette découverte, il est possible de compléter les informations trouvées  sur la vie de la communauté franciscaine et de diversifier nos sources, à savoir les chroniques de Verniero et le livre du Père Horn. Ceux-ci ne décrivent pas la vie quotidienne des franciscains au Cénacle, et n’offrent pas un commentaire sur les objets utilisés par les religieux au cours de cette époque.

Qu’est-ce que ces collections nous disent d’autre sur la Custodie de Terre Sainte à cette époque ?

Les collections retrouvées mettent également en lumière l’organisation des frères. De nombreux bols de poterie importés de Venise indiquent l’existence d’une communauté d’environ 20 ou 25 personnes et d’une relation assez étroite entre les franciscains et la Sérénissime. La poterie indique aussi qu’il existait une différence hiérarchique entre les religieux, car nous avons retrouvé des bols luxueux qui appartenaient probablement au Custode et au comité exécutif. En outre, la présence de poteries importées d’Espagne et d’autres régions de la Méditerranée montre que les frères avaient de nombreuses relations et constituaient le centre d’un vaste réseau de routes économiques, diplomatiques et commerciales.

Certaines pièces seront-elles exposées dans le musée ? Pourquoi sont-elles intéressantes pour le public ?

La découverte de l’ancienne pharmacie liée au couvent du Cénacle est importante pour le public et les visiteurs car elle témoigne du rôle joué par les frères depuis leur arrivée en Terre Sainte. L’existence d’une pharmacie bien organisée atteste que les franciscains se sont occupés des pèlerins et de la communauté chrétienne qui y vivaient, qu’ils ont gardé les lieux saints et qu’ils ont évangélisé la région. Grâce à leurs connaissances et à leurs compétences pharmaceutiques, les franciscains ont obtenu la reconnaissance de la communauté musulmane locale. En fait, les frères ont guéri toutes les personnes qui avaient besoin d’aide, indépendamment de leur religion et de leur statut social, devenant alors de plus en plus connus et respectés.

Share
email whatsapp telegram facebook twitter